Des contemporains
marqués :
Le château
d'Amboise marqua très tôt les esprits et apparut
aux yeux des contemporains de sa construction comme un monument
d'exception. Chacun y sentit bien les derniers rayons du gothique
finissant, mêlés à l'introduction des
premières influences de la Renaissance italienne. Commynes
rapporte le sentiment général : " Le roy
estoit en son chasteau d'Amboise, ou il avoit entreprins le
plus grant ediffice que commença cent ans, roy, tant
au chasteau que a la ville. Et se peuvent veoir les tours
par ou l'on monte a cheval et par ce qu'il avoit entreprins
en la ville, dont les patrons estoient faictz de merveilleuse
entreprinse et despence et qui de long temps n'eussent prins
fin. Et avoit amené de Napples plusieurs maistres excellens
en plusieurs ouvraiges, comme tailleurs et paintres. Et sembloit
bien que ce qu'il entreprenoit estoit emprise de roy jeune
et qui ne pensoit point a la mort, mais esperoit longue vie
; car il joignoit ensemble toutes les belles choses dont on
lui faisoit feste, en quelque païs qu'elles eussent esté
veues, fut France, Ytallie ou Flandres. "
Amboise aujourd'hui
:
De l'énorme
complexe palatial ne demeurent plus que la chapelle Saint-Hubert,
le tracé de l'enceinte, le corps de Logis en équerre
dominant la Loire et les deux grosses tours à rampe
douce.
On accédait
autrefois au plateau grâce à deux énormes
tours cylindriques, la tour des Minimes au Nord, et la tour
d'Heurtault au Sud. Chacune abrite donc une large rampe en
pente douce se lovant autour d'un noyau central évidé.
Charrettes et cavaliers pouvaient ainsi gagner la cour du
palais et en assurer l'approvisionnement. La tour d'Heurtault
possède des culs-de-lampe décorés de
motifs assez osés, témoignage marquant des murs
de l'époque.
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La chapelle Saint-Hubert
fut élevée en 1491, avant le début des
grands travaux donc, pour Anne de Bretagne, épouse
de Charles VIII puis de Louis XII. Elle chevauche le rempart
sud et n'est pas orientée (l'abside du chur est
tournée vers le sud). Petit chef-d'uvre de l'art
gothique flamboyant, on y apporta au commencement du XIXe
siècle des restes humains, que l'on pense être
ceux de Léonard de Vinci. On y remarque notamment une
riche décoration intérieure, une belle paire
de vantaux et un linteau sculpté présentant
des scènes de la vie de saint Hubert.
Le logis royal en
équerre domine la Loire de sa belle façade percée
de nombreuses fenêtres et lucarnes. La salle dite "
des Etats " ou " du Conseil ", située
au premier étage, est à rapprocher de la salle
des Etats au château de Blois. Bien que près
de trois siècles séparent les deux réalisations,
elles émanent toutes deux du même courant architectural.
Cette salle des Etats date du règne de Charles VIII
et est construite en alternance de brique rouge et de pierre
blanche, les concepteurs jouant sur les teintes pour lui conférer
un indéniable esthétisme. Elle est notamment
chauffée par une belle cheminée à la
hotte semée de lis (armes de France, pour Charles VIII)
et d'hermine (armes de Bretagne, pour sa femme Anne). Elle
est partagée en deux nef voûtées avec
piliers centraux cylindriques ornés de lis. Ici furent
sommairement jugés les principaux conjurés de
1560. La salle donne sur un balcon où furent pendus
ou décapités la plupart des malheureux. Cette
terrasse a pris depuis le sinistre nom de balcon des Conjurés.
Le bâtiment en retour d'équerre date du règne
de Louis XII pour la structure et essentiellement de celui
de François Ier pour la décoration. Il témoigne
de la pénétration accrue des principes architecturaux
Renaissance en France sous le règne du Père
du Peuple. Les autres édifices ont tous disparu dans
la tourmente des siècles.
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