Le
château fort :
Le roi Louis VI (1108-1137)
est conquis par le site en raison de la proximité de
la giboyeuse forêt de Laye, et y fonde en 1122-1124
une première forteresse. Il en subsiste le donjon quadrangulaire,
largement réaménagé durant les siècles
suivants. Louis IX (1226-1270) apprécie également
le séjour et y entreprend d'importants travaux. Il
y élève notamment, entre 1230 et 1238, la belle
chapelle castrale. Le château et le bourg de Saint-Germain
sont entièrement rasés par les troupes d'Edouard
III en 1346, peu avant la bataille de Crécy (26 août
1346). Philippe VI de Valois et Jean II le Bon délaissent
les lieux, contrairement à Charles V (1364-1380) qui
y édifie un palais entre 1364 et 1367. Dans l'ancien
donjon de Louis le Gros est installé le cabinet d'étude
du roi. Les Anglais s'emparent de la place vers 1420 et l'occupent
jusqu'en 1440.
La Renaissance :
La destinée
royale de Saint-Germain se confirme avec le mariage, dans
la chapelle, du jeune François d'Angoulême (futur
François Ier) avec Claude de France, fille unique du
roi Louis XII (1498-1515), le 18 octobre 1514. C'est François
Ier, monarque sans cesse impécunieux mais toujours
dispendieux, qui lance le chantier d'un nouveau château
en 1539. Saint-Germain vient s'ajouter à la longue
liste de ses réalisations : Chambord,
Fontainebleau, Blois,
le Louvre, Villers-Cotterêts
Les travaux sont menés par Pierre de Chambiges et surtout
Philibert Delorme, également connu pour sa participation
à Fontainebleau,
aux Tuileries et à
Anet. La salle de bal située
au premier étage de l'aile ouest, désignée
sous le nom de salle de Mars, n'a pas encore reçu sa
couverture lorsque le roi s'éteint, le 31 mars 1547.
La même année, au mois de juillet, se déroule
sur l'esplanade du château un duel appelé à
entrer dans la légende. Guy Chabot, baron de Jarnac,
affronte le sire de La Chastaigneraie. Par une passe d'arme
devenue proverbiale (le coup de Jarnac), Chabot tranche le
jarret de son adversaire qui succombera quelques jours plus
tard des suites de sa blessure.
Il revient à
Henri II, né et baptisé à Saint-Germain,
de terminer l'uvre paternelle. La salle de Mars est
inaugurée en grandes pompes le 19 mai 1549, par un
immense banquet donné en l'honneur de la naissance
du prince Louis (décédé un an plus tard).
En 1559, l'ensemble compte pas moins de 8 000 m² habitables,
7 chapelles, 55 logis, une cuisine et une prison. Henri II
entame également la construction d'un second palais,
plus à l'est et dominant la Seine (le Château
Neuf), dont il confie la réalisation à Le Primatice,
déjà actif à Fontainebleau.
Il sera achevé sous Henri IV (1572-1610) par les architectes
Louis Métezeau et Baptiste Androuet du Cerceau. Ce
dernier a notamment pris la suite de Pierre Lescot au Louvre
et n'est autre que le fils de Jacques Androuet du Cerceau,
auteur des Plus
excellents bastiments de France.
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L'âge d'or
:
Louis XIV naît
à Saint-Germain en 1638 et y séjourne quasiment
en permanence. Le Roi Soleil ne jure que par la démesure.
Il lui faut davantage de place pour loger sa nombreuse cour.
Il délaisse le Château Neuf, devenu insalubre,
pour s'installer dans le Château Vieux. Sous la baguette
de Jules Hardouin Mansart s'élèvent cinq pavillons
d'angles. Jardins et terrasses sont dessinés par Le
Nôtre. Saint-Germain devient de facto la capitale politique
du royaume de France. Les noms les plus prestigieux de ce
temps sillonnent les couloirs du palais : Mazarin, Madame
de Montespan, le grand Condé, Turenne, Louvois, le
surintendant Fouquet, Colbert
Molière donne dans
la salle de Mars, transformée en théâtre
et rebaptisée salle des Comédies, les premières
représentations de l'Avare et du Bourgeois Gentilhomme,
rythmées par la musique de Jean-Baptiste Lulli. Le
roi en personne participe au spectacle en 1666 dans Le bal
des muses.
Le déclin
:
Mais déjà
l'âge d'or touche à sa fin. Louis XIV a lancé
le chantier de Versailles en 1668 et il abandonne Saint-Germain
en 1682. Le château est vidé de ses meubles et
de ses occupants. Il retrouve toutefois un semblant de vie
à partir de 1689, en devenant le refuge du roi d'Angleterre
déchu, Jacques II Stuart. Il y meurt le 16 septembre
1701. Sa famille demeure dans les lieux jusqu'en 1713, date
à laquelle Louis XIV signe le traité d'Utrecht,
entérinant la paix avec la nouvelle dynastie anglaise.
Son fils Jacques III Stuart, dit le Prétendant (ou
le Chevalier de Saint-Georges), doit quitter la France avec
les siens. Coquille sans âme, le palais ne suscite désormais
plus aucun intérêt aux yeux de la couronne. Louis
XVI octroie la Château Neuf à son frère
Charles, comte d'Artois (le futur Charles X). Celui-ci le
fait presque entièrement détruire. Sous la Révolution
et le Premier Empire, Saint-Germain devient tour à
tour prison, hôpital et école de cavalerie. Il
sert de lieux de garnison aux forces anglaises d'invasion
après la bataille de Waterloo (18 juin 1815). Louis-Philippe
le confie à l'armée pour y installer une prison
militaire. Des geôles sont compartimentées dans
les anciens appartements royaux ou princiers !
Une seconde "
Renaissance " :
Napoléon III
se penche sur le chevet de la vieille bâtisse et décide
d'y installer le Musée des Antiquités celtiques
et gallo-romaines. L'architecte Eugène Millet,
disciple d'Eugène Viollet le Duc, détruit les
pavillons érigés par Mansart au XVIIe siècle
et restitue l'aspect du palais au temps de sa splendeur. Le
musée est inauguré au cours de l'année
1867 en présence de l'empereur. La vieille bâtisse
est encore le témoin muet d'un événement
historique majeur : le 10 septembre 1919, les alliés
y signent la paix avec l'Autriche. Le château de Saint-Germain
abrite aujourd'hui les fabuleuses collections du Musée
des Antiquités Nationales.
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