Le château
occupe le sommet d'un éperon rocheux. Il communiquait
avec la ville fortifiée par une porte enserrée
entre deux cylindres. Il est divisé en deux parties
inégales :
1/ Une immense basse-cour
dessinant un polygone presque rectangulaire, flanqué
autrefois d'une douzaine de tours circulaires. Le diamètre
de chacune de ces tours oscillait entre 8 et 9 mètres.
Elles étaient percées d'archères afin
d'assurer un parfait flanquement des courtines et probablement
hourdées.
On trouvait au sein de cette basse-cour de nombreux bâtiments
utilitaires : écuries, communs
mais aussi une
chapelle orientée vraisemblablement romane avec un
chevet en absidioles. Elle servait certainement au culte des
différents serviteurs du seigneur. La plupart de ces
édifices ont disparu mais le plan au sol de la chapelle
demeure encore parfaitement lisible.
2/ Isolé de
cette première enceinte par un profond fossé
sec, le château principal occupe l'extrémité
nord du promontoire. II forme un trapèze de 80 * 92
* 35 * 50 mètres. Aux quatre angles se dressaient des
tours cylindriques d'une vingtaine de mètres de diamètre
pour une hauteur d'environ 40 mètres. A titre de comparaison,
la tour philippienne de Falaise culmine aujourd'hui à
30 mètres pour un diamètre de 15 mètres.
Ces constructions possédaient au sommet des corbeaux
de pierre sur lesquels venaient s'appuyer les jambages de
hourds, et cinq niveaux internes d'élévation.
Leur base talutée était pleine et les murailles
percées de longues et belles archères.
A cheval sur la courtine
sud s'élevait le grand donjon. 30 mètres de
diamètre, presque 100 mètres de circonférence,
54 mètres de haut ! Un monstre ! Il était placé
sur le point le plus exposé, du côté de
l'attaque, selon les canons popularisés par Philippe
Auguste, à Dourdan notamment. Il était protégé
par une demi-chemise sur la moitié de sa hauteur. Il
possédait trois étages voûtés en
pierre, et une plate-forme sommitale. Les volumes intérieurs
étaient donc gigantesques.
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En 1451, Coucy appartenait
toujours à la branche d'Orléans. Antoine d'Asti,
secrétaire du poète Charles d'Orléans,
raconte son étonnement lors de sa première visite
dans la vieille demeure féodale :
« J'ai vu en
outre la forteresse la plus solide du monde, le château
admirable du duc d'Orléans à Coucy. Et pour
que vous puissiez juger de la vérité de mes
dires, je veux vous en décrire la forme dans mes vers.
Le château de Coucy est situé sur les confins
de la Picardie, bâti sur une belle colline, fortifié
de cinq tours et de superbes murailles d'une merveilleuse
solidité. La grande tour : cette grande tour, la plus
forte qu'il y ait dans le royaume de France paraît très
élevée. J'en ai fait l'ascension, non sans fatigue,
en comptant deux cent vingt-deux marches. Elle est haute de
trente-trois aunes (soit environ 37 mètres. Le donjon
de Coucy culminait en fait à plus de 54 mètres
!) et l'on dit que les murs descendent dans la terre à
une égale profondeur. »
Les bâtiments
d'habitation s'adossaient aux murailles nord, ouest et est
: communs à l'orient ; énorme cave voûtée
avec au-dessus la grande salle à l'occident ; logis
seigneurial sur la façade méridionale. Une chapelle
orientée partait à l'équerre de la grande
salle, au même étage. L'ensemble fut très
largement réaménagé sous Enguerrand VII
dans la seconde moitié du XIVe siècle, puis
par Louis d'Orléans avant 1407. De cette époque
datent la salle des Preux et celle des Preuses.
Malgré l'acharnement
des hommes à le détruire, le château de
Coucy présente toujours d'extraordinaires vestiges.
Une association dynamique aidée par la municipalité
contribue à la perpétuation de cet élément
incomparable de notre patrimoine collectif. L'enceinte urbaine
fait l'objet de soins attentifs et réguliers. Les lointains
héritiers des sires de Coucy, à la mesure de
leurs moyens, se montrent à la hauteur de leurs glorieux
prédécesseurs.
L'abbé Jules
Caron résume le sentiment général devant
l'ensemble : « Le château de Coucy inspire à
première vue un sentiment presque respectueux, comparable
à celui qu'on éprouve devant les pyramides,
le Colysée ou Saint-Pierre de Rome. L'imagination humaine
se trouve dépassée : on ne croyait pas voir
si grand. Et lorsqu'on cherche à se familiariser avec
cette forteresse colossale, on arrive bientôt à
voir que l'harmonie des proportions contribue presque autant
que les dimensions à donner à Coucy son aspect
terrifiant et grandiose. »
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