La présence
du toponyme " dun " implique peut-être l'existence
d'une forteresse en ce lieu dès l'époque celtique.
" Dunum castrum " est mentionné au VIe siècle,
dans l'Histoire des Francs de Grégoire de Tours. Le
site était sans doute déjà fréquenté
durant l'Antiquité, trônant au carrefour de deux
voies romaines d'importance (Chartres-Tours et Orléans-Le
Mans). Le prélat historien nous apprend la vaine tentative
du roi des Francs Sigebert Ier (561-575) d'y implanter un
évêché démembré de celui
de Chartres. Il nous relate également les péripéties
d'un conflit sanglant opposant les habitants de la région
à ceux d'Orléans et de Blois.
Siège d'un
comté à l'époque carolingienne, Châteaudun
subit probablement de plein fouet le choc des invasions scandinaves
au cours du IXe siècle. La forteresse est certainement
restaurée au Xe siècle par l'omnipotent comte
de Blois, Chartres, Provins et Tours, Thibaut Ier le Tricheur
(mort en 978). L'historien Richer évoque dans son Histoire
de France le " castrum quod Dunum dicitur ", "
le château que l'on nomme Dunum ". Au décès
sans héritier du comte Thibaut VI (1218), la principauté
blésoise passe à sa tante Marguerite, femme
de Gautier d'Avesnes, puis à la fille de ce couple,
Marie, épouse de Hugues de Châtillon.
Les Chatillon règne
sur les lieux jusqu'en 1391, date à laquelle Louis
d'Orléans, frère cadet du roi Charles VI (1380-1422),
achète le comté de Blois au dernier rejeton
de la lignée, Guy II. La famille d'Orléans est
cependant vite dévastée par l'adversité
: Louis est assassiné par ordre du duc de Bourgogne
Jean Sans Peur en 1407 ; son fils aîné, Charles,
est fait prisonnier par les Anglais à Azincourt (1415)
; son cadet, Jean d'Angoulême, était déjà
détenu comme otage en Angleterre depuis 1412 ; son
dernier fils légitime, Philippe de Vertus, décède
en 1420. Seul reste libre un bâtard né des amours
de Louis d'Orléans et de Marguerite d'Enghien : Jean,
dit le Bâtard d'Orléans. Cette homme s'illustre
aux côtés de Jeanne d'Arc et se montre un valeureux
capitaine. Il participe activement à la victoire définitive
sur les armées anglaises.
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Ces lauriers remportés
au combat lui attirent toutes les grâces. Charles VII
reconnaissant en fait un membre à part entière
de la maison d'Orléans, et donc à ce titre un
prince des Lys. Grand chambellan de France en 1436, comte
de Longueville en 1449, il reçoit de son frère
Charles d'Orléans le comté de Dunois dès
1439, par échange avec le comté de Vertus. C'est
ce nom de Dunois qu'il portera haut pour la postérité.
Dès la fin de l'année 1450, Jean lance les travaux
à Châteaudun, sans doute par le couvrement de
la grosse tour datant de Thibaut V. La construction de la
Sainte-Chapelle débute l'année suivante. Le
grand logis est lancé en 1459, sous la baguette du
maître maçon Nicole Duval. A la mort de Dunois,
le chantier est certes bien avancé, mais encore loin
de son achèvement. A l'aile occidentale existante,
ses successeurs François Ier de Longueville (mort en
1491) et François II (mort en 1513) donnent une aile
septentrionale, formant un logis en équerre dominant
la vallée du Loir. La chapelle n'obtient le statut
convoité de Sainte-Chapelle (établissement directement
placé sous l'autorité du pape et détenant
une relique de la passion du Christ), qu'en 1491.
La vielle forteresse-palais
reste dans la famille de Longueville jusqu'à son extinction
en 1694. Elle échoit alors par mariage à la
famille de Luynes et y demeure jusqu'en 1938, date de son
acquisition par l'Etat. Elle échappe à la tourmente
révolutionnaire par miracle, malgré quelques
déprédations, et fait l'objet de deux pillages
par les Prussiens (1815 et 1870). Le duc de Luynes avait entre
les deux épreuves lancé une première
campagne de restauration en 1860. Une seconde débute
en 1939 sous la direction de l'architecte des Monuments Historiques
Jean Trouvelot. Il fait toujours aujourd'hui l'objet de soins
attentifs.
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