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La forteresse suit
parfaitement les contours d'une arête rocheuse sur 270
m de long et une largeur moyenne de 40 m. Elle est construite
en beau grès rose si caractéristique de certaines
fortifications alsaciennes. Son côté ouest est
flanqué de deux grosses tours à canons cylindriques
(fin XVe), de diamètres assez différents toutefois.
Elles furent sans doute recouvertes au XXe siècle.
La plus imposante possède des murs atteignant jusqu'à
9 mètres d'épaisseur. Au centre se dresse un
logis bâti à partir de 1479 sur le noyau originel
du château. Des appartements y furent entièrement
aménagés pour le Kaiser et son épouse.
L'ensemble est dominé par une haute tour-beffroi (bergfried),
totalement reconstituée par Bodo Ebhardt. A l'orient
enfin, s'étire un vaste bastion d'artillerie formant
une basse-cour, flanqué aux angles de tours en U.
Tout le pourtour
de l'enceinte était autrefois pourvu d'un chemin de
ronde à mâchicoulis sur corbeaux, comme en témoigne
une série de clichés antérieurs aux restaurations
des années 1900 et les relevés d'Ebhardt.
Cette recréation
vieille d'un siècle d'une sorte de " Moyen Âge
idéal " ne saurait à l'évidence
incarner un exemple architectural médiéval de
référence. Comme l'a fort bien souligné
Jean Mesqui, " la visite vaut essentiellement par sa
révélation sociologique du temps. "
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De tels ouvrages
ont néanmoins imprégné l'imaginaire collectif
de générations entières et peut-être
suscité une certaine attirance du grand public pour
une époque relativement méprisée jusqu'au
cur des années 1950. Aujourd'hui encore, le terme
" moyenâgeux " - discutable au demeurant,
tant sur les plans esthétique que littéraire
- employé récemment par le commissaire européen
Pascal Lamy pour qualifier les institutions de l'Organisation
Mondiale du Commerce, désigne quelque chose d'obscur,
glauque, arriéré, pour ne pas dire franchement
stupide.
Un Bodo Ebhardt
a su casser partiellement le mythe et apporter une autre vision,
celle d'une ère chatoyante, diverse et riche, propre
à offrir à l'inconscient collectif ce qu'il
recherche par dessus tout : une part de rêve. Même
tronquée, cette part de rêve constitue un capital
précieux aux inestimables dividendes. Les intérêts
engrangés par le Haut-Knigsbourg et quelques
divers lieux emblématiques, se déversent en
cascade sur d'autres monuments moins prestigieux et contribuent
à leur préservation. Ils prennent la forme de
foules bigarrées, avides d'en savoir davantage que
ce que racontaient leurs laconiques manuels scolaires d'histoire
sur le passé de leurs ancêtres. La manne touristique,
dans un pays qui dénombre plusieurs centaines de milliers
de sites classés, incarne en effet la meilleure garante
de la survie de notre patrimoine.
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