Le " Provinensis
pagus " apparaît pour la première fois dans
un capitulaire de Charlemagne daté de 802. Nous y apprenons
notamment que le comte de Paris Stephanus (Etienne) et l'abbé
de Saint-Denis Fardulfus sont les missi dominici chargés
de se rendre sur place pour contrôler l'administration
des fonctionnaires locaux. Dès l'époque carolingienne
donc, la cité de Provins constituait le centre d'un
comté. Ce comté est de nouveau mentionné
dans un acte de la chancellerie de Charles le Chauve (840-877)
au milieu du IXe siècle. Dans le contexte extrêmement
troublé des invasions scandinaves, il est improbable
qu'un site de cette importance ne soit pas déjà
fortifié.
Au milieu du Xe siècle,
Provins appartient au comte de Tours, de Blois et de Chartres,
le redoutable Thibault le Tricheur (v. 908-978), fondateur
de la maison de Blois-Champagne. Du XIe au XIIIe siècle,
ses descendants ne cessent de menacer le domaine royal qu'ils
encerclent presque totalement. Provins est au cur de
leur principauté indépendante. Les maîtres
successifs de la Champagne cherchent à en accroître
la richesse et le prestige. Deux des six foires annuelles
du puissant comté se tiennent dans la cité :
celle de saint Ayoul (en septembre), connue dès 1085
et celle de saint Quiriace (en mai), formellement attestée
en 1141. Elles font la fortune et la renommée de la
ville. Le comte Henri le Libéral (1152-1181) y fait
édifier la Tour dite de César et compléter
le magnifique palais comtal, à proximité de
la collégiale Saint-Quiriace. Avec Meaux et Troyes,
Provins constitue l'une des capitales de la Champagne.
A la charnière
des XIIe et XIIIe siècles, Provins atteint l'apogée
de sa gloire. Sa monnaie, le denier provinois, circule dans
toute l'Europe Occidentale. Son industrie drapière
est également très renommée. Quelques
épisodes militaires émaillent ici et là
son histoire, comme le siège mené vainement
en 1230 par Philippe Hurepel, comte de Boulogne et fils cadet
du roi Philippe Auguste. Le comte Thibault IV (1201-1253)
qui défend la ville, homme de guerre et poète
de renom, lui tient victorieusement tête. Ce même
Thibault IV devient par héritage maternel roi de Navarre
en 1234. Rien ne semble pouvoir stopper l'ascension de la
maison champenoise.
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Mais déjà
s'annonce des temps moins prospères. Soumise à
la concurrence farouche des foires flandriennes et rhénanes,
la Champagne amorce un inéluctable déclin économique
dans la seconde moitié du XIIIe siècle. Provins
sombre avec elle. Pour remédier à une situation
difficile, le maire de la ville, Guillaume Pentecôte,
tente en 1279 de rallonger la durée quotidienne du
travail. Il est impitoyablement massacré par le peuple
révolté. La commune est sévèrement
punie et perd une partie de sa richesse. Lorsque l'unique
descendante des comtes de Champagne, Jeanne de Navarre, épouse
l'héritier au trône de France, le futur Philippe
IV le Bel (1284), Troyes, Meaux et Provins entrent dans l'orbite
capétienne. Elles sont définitivement annexées
par le roi Philippe V le Long en 1316.
Provins ne joue plus
alors qu'un rôle géopolitique secondaire. Mais
l'insécurité née de la Guerre de Cent
Ans oblige les habitants à entretenir à prix
d'or leur système fortifié. La ville voit ses
campagnes dévastées par les Anglais, les Routiers,
les Jacques
Jeanne d'Arc et Charles VII y passent brièvement
en rentrant du sacre de Reims, le 3 août 1429. Les Anglais
s'en emparent en 1432 avant de la perdre l'année suivante.
C'est le roi Henri IV qui met un terme définitif à
sa carrière militaire au crépuscule du XVIe
siècle (1592).
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