Soissons fut fondée
sous le règne de l'empereur Auguste (31 av. J.-C. -
14 apr. J.-C.) peu avant le commencement de l'ère chrétienne.
Elle comportait sans doute tous les équipements prisés
par les populations romanisées : thermes, théâtre,
forum
Elle avait rang de capitale des Suessiones. Elle
se dota au Bas-Empire d'une enceinte fortifiée d'un
périmètre total de 1500 m enserrant 13 ha. Un
évêque s'y installa dans la foulée. Après
l'effondrement total de l'Empire Romain, Soissons devint capitale
du royaume provisoire de Syagrius, dernier lambeau de romanité
en Gaule. Les Francs de Clovis écrasèrent son
armée à proximité en 486. Le partage
du butin ouvrit une querelle légendaire entre Clovis
et l'un de ses guerriers.
Le vase de Soissons
:
L'évêque
Grégoire de Tours (VIe siècle) rapporte dans
sa précieuse Histoire des Francs cette anecdote que
des générations d'écoliers ont apprise
par cur : " Dans ce temps, l'armée de Clovis
pilla un grand nombre d'églises, parce que ce prince
était encore plongé dans un culte idolâtre.
Des soldats avaient enlevé d'une église un vase
d'une grandeur et d'une beauté étonnante, ainsi
que le reste des ornements du saint ministère. L'évêque
de cette ville envoya vers lui des messagers pour lui demander
que, s'il ne pouvait obtenir de recouvrer les autres vases,
on lui rendit au moins celui-là. Le roi, ayant entendu
ces paroles, dit au messager : Suis-moi jusqu'à Soissons,
parce que c'est là que l'on partagera le butin ; et
lorsque le sort m'aura donné ce vase, je ferai ce que
me demande le pape [l'évêque]. Etant arrivés
à Soissons, on mit au milieu de la place tout le butin,
et le roi dit : Je vous prie, mes braves guerriers, de bien
vouloir m'accorder, outre ma part, ce vase que voici, en montrant
le vase dont nous avons parlé. Les plus sages répondirent
aux paroles du roi : Glorieux roi, tout ce que nous voyons
est à toi. Nous-mêmes sommes soumis à
ton pouvoir. Fais donc ce qui te plait, car personne ne peut
résister à ta puissance. Lorsqu'ils eurent ainsi
parlé, un guerrier présomptueux, jaloux et emporté,
éleva sa francisque et en frappa le vase en s'écriant
: Tu ne recevras de tout ceci rien d'autre que ce que te donnera
vraiment le sort. A ces mots, tous restèrent stupéfaits.
Le roi cacha le ressentiment de cet outrage sous un air de
patience. Il rendit au messager de l'évêque le
vase qu'il avait reçu, gardant au fond de son cur
une secrète colère. Un an s'étant écoulé,
Clovis ordonna à tous ses guerriers de venir au Champ-de-Mars
revêtus de leurs armes, pour faire voir si elles étaient
brillantes et en bon état. Tandis qu'il examinait tous
les soldats en passant devant eux, il arriva auprès
de celui qui avait frappé le vase, et lui dit : Personne
n'a des armes aussi mal tenues que les tiennes, car ni ta
lance, ni ton épée, ni ta hache ne sont en bon
état, et lui arrachant sa hache, il la jeta à
terre. Le soldat s'étant baissé un peu pour
la ramasser, le roi levant sa francisque la lui abattit sur
la tête en lui disant : C'est ainsi que tu as fait avec
le vase à Soissons. " (voir cliché 20 du
diaporama)
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Une ville au carrefour
de l'histoire :
La cité et
ses alentours furent également le théâtre
de nombreux autres évènements historiques importants.
Pépin le Bref, le premier monarque de la lignée
carolingienne, y prit la couronne en 752. Les Annales Royales
témoignent : " Pépin fut appelé
roi des Francs, oint pour cette haute dignité de l'onction
sacrée par la sainte main de Boniface, archevêque
et martyr d'heureuse mémoire, et élevé
sur le trône selon la coutume des Francs, dans la ville
de Soissons. " C'est aussi à Soissons que son
fils Carloman fut sacré souverain pour la partie orientale
de son royaume en 768, pendant que sont autre fils Charles
(futur Charlemagne) recevait l'investiture pour la partie
occidentale à Noyon.
La région fut régulièrement dévastée
par les Vikings dans la seconde moitié du IXe siècle
et Soissons semble avoir subi le pillage en 882.
C'est encore à
Soissons qu'eut lieu une bataille décisive pour l'avenir
du royaume. En 923, le roi Robert Ier (ancêtre des Capétiens,
voir aula carolingienne de Doué-la-Fontaine)
affronta l'armée de son concurrent pour le trône,
le roi carolingien Charles le Simple, qu'il avait fait destituer
quelques mois plus tôt. Elle se solda par la mort de
Robert, mais aussi par la défaite totale de Charles.
Fait prisonnier peu après, le vaincu terminera ses
jours prisonnier du comte Herbert II de Vermandois à
Péronne
et Château-Thierry.
A Soissons se tinrent
plusieurs conciles, dont celui qui obligea Pierre Abélard
à brûler son traité De l'unité
et de la Trinité de Dieu (1121). Le chantier de la
nouvelle cathédrale démarra au XIIe siècle,
sous l'épiscopat de Nivelon de Quierzy (1176-1207),
par le bras sud du transept. La dédicace du nouveau
chur eut lieu le 12 mai 1212. Les travaux de la nef
se poursuivirent durant tout le XIIIe siècle. Le XIVe
siècle ajouta le croisillon nord du transept et la
tour-clocher sud. La guerre de Cent Ans empêcha l'édification
du clocher nord. Les évêques de Soissons, premiers
suffragants des archevêques de Reims, ont ainsi manifesté
leur toute puissance. Nombre d'entre eux jouèrent un
rôle politique éminent, comme Nivelon de Quierzy,
proche de Philippe Auguste, ou Simon le Gras, d'abord aumônier
du roi Henri IV. Consécration suprême, c'est
lui qui sacra Louis XIV en la cathédrale de Reims,
le 7 juin 1654. L'embellissement se poursuivit aux XVIIIe
et XIXe siècles. C'est durant la Première Guerre
Mondiale que Soissons subit sa passion. La cathédrale
fut gravement endommagée par les bombardements de 1915.
Elle fut après cette épreuve restaurée
à l'identique.
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